Le documentaire « The New Yorker at 100 » du réalisateur Marshall Curry lève le voile sur l’une des institutions médiatiques les plus prestigieuses au monde.
Comment une publication parvient-elle à rester pertinente pendant cent ans dans un monde médiatique en perpétuelle mutation ? C’est la question centrale du nouveau documentaire de Netflix, « The New Yorker at 100 ».
Disponible depuis le 5 décembre sur la célèbre plateforme de vidéo à la demande, le film, conçu pour célébrer le centenaire du New Yorker, propose en un peu plus de 90 minutes une immersion dans les coulisses de ce magazine mythique, véritable pilier du journalisme américain et mondial.
Un pari ambitieux, même pour le réalisateur oscarisé Marshall Curry. Comme le souligne Le Monde, « il faudrait plusieurs heures supplémentaires pour documenter en profondeur le travail des journalistes et l’impact de la révolution numérique sur un magazine qui se pense avant tout comme un objet ».
Le documentaire s’appuie néanmoins sur un casting à la hauteur du prestige et de l’influence culturelle du New Yorker. Julianne Moore, également lauréate d’un Oscar, prête sa voix à la narration.
D’un magazine satirique à une institution journalistique
Jesse Eisenberg et la romancière nigériane Chimamanda Ngozi Adichie, tous deux collaborateurs du périodique, évoquent leur expérience au sein de la rédaction. Sarah Jessica Parker et Molly Ringwald, lectrices passionnées, livrent leur admiration pour la dessinatrice Roz Chast, dont les illustrations ont marqué plusieurs générations.
Le film suit aussi Françoise Mouly, directrice artistique du magazine, dans l’élaboration minutieuse de la couverture du centenaire. Les caméras se glissent aux côtés des reporters du New Yorker, des zones de guerre les plus périlleuses aux entretiens exclusifs avec des figures politiques et culturelles de premier plan.
Fondé en 1925 comme revue humoristique destinée à l’élite new-yorkaise, le New Yorker s’est progressivement transformé en une référence du journalisme d’enquête et du grand reportage. Cette évolution est illustrée par plusieurs épisodes marquants, dont la couverture intégrale consacrée au bombardement d’Hiroshima, qui a redéfini les standards du reportage de guerre.
Les zones d’ombre d’un avenir incertain
Les textes incisifs de James Baldwin sur les droits civiques témoignent de la capacité de la revue à aborder les débats sociétaux les plus sensibles avec nuance et engagement.
Le film met aussi en lumière un pilier discret, mais essentiel de la réputation du magazine : son célèbre service de vérification des faits. Vingt-neuf spécialistes y scrutent chaque donnée, chaque date et chaque nom avant publication.
Malgré sa vitalité et son adaptation réussie aux supports numériques, l’avenir du New Yorker soulève des interrogations. La succession de David Remnick, qui a façonné la ligne éditoriale de la revue depuis plus de vingt ans, apparaît comme un enjeu majeur. Par ailleurs, la mobilisation syndicale pour la négociation collective avec le groupe Condé Nast révèle des tensions économiques et sociales au sein même de l’institution.