Collège de France : la première chaire permanente consacrée à l’histoire ancienne de l’Afrique

Mansa Moussa, dixième mansa de l'empire du Mali de 1312 à 1332

 

L’histoire de l’Afrique ancienne a fait son entrée au Collège de France. Cette première chaire a été confiée à l’historien et archéologue François-Xavier Fauvelle, élu en novembre dernier au sein de l’institution de la place Marcelin-Berthelot. Il a prononcé sa leçon inaugurale le jeudi 3 octobre 2019, devant un auditoire composé d’intellectuels et de chercheurs africanistes.

Les chercheurs africains ont brillé par leur absence 

Enfin, pourrait-on dire ! La première chaire permanente consacrée à l’histoire ancienne de l’Afrique intitulée « Histoire et archéologie des mondes africains » a été inaugurée le jeudi 3 octobre par l’historien et archéologue François-Xavier Fauvelle, à qui elle est confiée. Il a prononcé son cours magistral dans un amphithéâtre Marguerite-de-Navarre plein à craquer. Parmi l’auditoire on comptait des intellectuels, des chercheurs africanistes, l’ancien président François Hollande et des ex ministres. Paradoxalement, rares étaient les Africains. Cette absence qui intrigue trouve peut-être ton origine dans le désintérêt des Africains pour leur propre histoire. Ce désintérêt est largement incarné par les dirigeants, qui n’accordent pas de subventions à la recherche dans les universités publiques. « Sur l’histoire ancienne de l’Afrique, il y a beaucoup moins de collègues africains qu’il y en a en Europe. Il y a un désinvestissement des pouvoirs publics, très peu de filières doctorales, peu de pays sont capables de recruter deux ou trois archéologues par an. », déplore François-Xavier Fauvelle.

« On peut raconter des choses, mais pas de la même façon que l’histoire de la France du Moyen Âge »

« L’Afrique est  un continent géographique, mais c’est plusieurs continents d’histoire, qui  évoluent dans  le temps et sont connectés les uns aux autres. Et connectés avec les mondes non africains. Dès le XIIesiècle, on trouve des porcelaines importées de Chine à Madagascar ou encore à Maungubwe, le fameux site sudafricain du rhinocéros d’or. On a trouvé aussi dans  un monastère éthiopien des monnaies kushanes, un   empire gréco bouddhiste d’Afghanistan au début de l’ère chrétienne. Toutes ces découvertes témoignent d’échanges commerciaux dans lesquels des Africains jouaient bien évidemment un rôle, imposant leurs goûtset négociant les termes de l’échange », a expliqué l’historien sur le site du Collège de France qui compilera les leçons du professeur, en textes et vidéos accessibles à tous. « Ça dessine quelque chose, mais on ne sait pas très bien quoi, poursuit François-Xavier Fauvelle. Il faut accepter d’avoir des creux et des pleins (…) On peut quand même raconter des choses, mais pas de la même façon que l’histoire de la France du Moyen Âge ».

L’auteur du Rhinocéros d’or et Histoires du Moyen Âge africain (Alma) prend ainsi le contrepied des afro-pessimistes qui dénient une histoire à l’Afrique. Les plus gentils parlent plutôt de « préhistoire » de l’Afrique, s’appuyant principalement sur le manque d’écriture « formelle ». Rappelons-nous du discours prononcé par Nicolas Sarkozy à Dakar, en 2007.  L’ancien président français fit scandale en déclarant que « l’homme africain n’est pas assez entré dans l’Histoire ». Pour le chercheur de 51 ans, c’est tout simplement une méprise de « l’homme noir », fondée uniquement sur la traite des esclaves et la colonisation qui l’ont « déshumanisé ».

L’Afrique a une histoire et une littérature

Ce que le monde ignore, et que certains chercheurs omettent expressément dans leurs œuvres, c’est que l’Afrique a bel et bien eu une histoire. Les études et les fouilles archéologiques ont montré qu’il a existé des sultanats islamiques au moyen âge, des royaumes avec divers systèmes d’écritures tout au long de la vallée du Nil, de l’Égypte jusqu’au Soudan. « Des sites historiques majeurs restent encore à découvrir, à l’instar de plusieurs capitales de royaumes médiévaux mentionnées par des sources arabes ou de villes antiques citées par des voyageurs grecs le long des côtes africaines de l’océan Indien. » s’enthousiasme François-Xavier Fauvelle. L’intellectuel veut également partager la richesse de la « littérature orale » africaine, à travers des récits historiques rédigés par des lettrés musulmans sous forme de chroniques pour le sultan de Zanzibar, à Tombouctou (Mali) ou à Kano (Nigeria).

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