Fort du retour de Trump à la Maison Blanche, la droite trumpiste entreprend de réécrire l’histoire selon sa vision du monde. Dans sa ligne de mire : Winston Churchill.
Le mercredi 9 juillet 2025, Donald Trump reçoit à la Maison Blanche cinq de ses homologues africains et s’étonne du niveau d’anglais du président du Liberia Joseph Boakai. « Où avez-vous appris à parler l’anglais aussi bien ? Où avez-vous étudié ?« , demande-t-il à son hôte après la prise de parole de ce dernier.
Cette séquence, massivement relayée sur les réseaux sociaux et dans la presse internationale, révèle un mépris et une inculture saisissants. Comment s’étonner de voir quelqu’un parler sa propre langue ?
Le Liberia, fondé par d’anciens esclaves américains affranchis, entretient des liens historiques étroits avec les États-Unis et a adopté l’anglais comme langue officielle depuis sa création en 1847. Une réalité que Trump, président des États-Unis, devrait connaître.
À moins qu’il ne se désintéresse totalement de l’Histoire et de ses acteurs. N’avait-il pas qualifié il y a quelques années le vétéran John McCain, son ancien rival républicain à la présidentielle, de « perdant » pour s’être « fait capturer » au Vietnam ?
Churchill, « le principal méchant » de la guerre
Cette inculture trouve depuis quelques mois un écho amplifié dans le débat public américain, portée par des figures du mouvement MAGA (Make America Great Again) comme le suprémaciste Andrew Tate ou l’ancien journaliste de Fox News Tucker Carlson.
Ce dernier recevait ainsi le 2 septembre 2024 dans son podcast particulièrement suivi « The Tucker Carlson Show » Darryl Cooper, autoproclamé « historien amateur », pour une démolition systématique de Winston Churchill.
Dans cette interview désormais regardée par plus d’un million de personnes, l’nvité développe une thèse stupéfiante : Churchill serait « le vrai méchant de la Seconde Guerre mondiale », détrônant ainsi Hitler de son sinistre podium.
Selon Cooper, Hitler aurait multiplié les propositions de paix à la Grande-Bretagne après l’invasion de la Pologne en 1939, puis après la conquête de la France en 1940. Churchill aurait rejeté ces offres, maintenant artificiellement le conflit par des bombardements terroristes de civils allemands dans l’espoir d’attirer les États-Unis dans la guerre.
Un agenda politique et idéologique assumé
« Tout ce qu’il avait, c’étaient des bombardiers. Il envoyait littéralement des flottes incendiaires bombarder la Forêt-Noire juste pour brûler des sections de forêt. Du terrorisme pur« , affirme l’historien.
Pour l’historien allemand Thomas Weber, cette attaque obéit à une stratégie bien rodée consistant à déconstruire tout ce que l’Amérique néoconservatrice vénère. Dans le cas de Winston Churchill, il jouit d’un grand respect au sein de l’ancien clan républicain, celui que Trump s’emploie à ensevelir.
« C’est le sacrifice rituel d’une icône de l’ancien Parti républicain. Churchill a été une figure sacrée pour une génération de républicains, ceux précisément que Cooper et Carlson méprisent« , souligne l’analyste dans les colonnes du Monde.