Covid-19 : en parlant des Africains comme des cobayes pour le test d’un vaccin, J-P Mira et C. Locht provoquent un tollé en Afrique

Une personne tenant une séringue.

 

Des déclarations tenues mercredi par deux chercheurs français, au sujet de test en Afrique sur un éventuel vaccin du Covid-19, ont déclenché un tollé sur le continent. Les sportifs, boxeurs, avocats et la toile africaine n’en finissent plus de dénoncer des propos graves, racistes et méprisants.

Dans une interview diffusée sur la chaîne d’information française LCI, mercredi 1er avril 2020, deux chercheurs français ont tenu des déclarations qui ont suscité la colère en Afrique, en France et dans le monde en général. Dans une séquence polémique, le Professeur Jean-Paul Mira, chef du service de réanimation de l’hôpital Cochin (Paris) avait suggéré ceci : « Si je peux être provocateur, est-ce qu’on ne devrait pas faire cette étude en Afrique, où il n’y a pas de masques, pas de traitements, pas de réanimation? Un peu comme c’est fait d’ailleurs pour certaines études sur le Sida. Chez les prostituées, on essaye des choses parce qu’on sait qu’elles sont hautement exposées et qu’elles ne se protègent pas ». Et le Professeur Camille Camille Locht, chercheur microbiologiste à l’INSERM, d’acquiescer : « « Vous avez raison, on est d’ailleurs en train de réfléchir à une étude en parallèle en Afrique ».

Samuel Eto’o explose

Cet échange a été violemment critiqué par des peoples africains ou d’origine africaine comme le rappeur Dosseh et le boxeur Tony Yoka. Ce dernier s’interroge : « Pourquoi c’est toujours l’Afrique le cobaye ? Pourquoi tu ne le testes pas sur ta mère d’abord ? ». L’ancien footballeur camerounais Eto’o se veut plus virulent : « Fils de P… Vous n’êtes que de la merde, n’est-ce pas l’Afrique est votre terrain de jeu ». On note également la réaction plus mesurée de Didier Drogba qui parle de propos graves, racistes et méprisants. Par ailleurs, de nombreux internautes, des activistes et des panafricanistes ont mis en pièce les médecins français. Ils ne comprennent pas pourquoi ces derniers veulent tester leur vaccin en Afrique en premier alors que l’Europe est plus touchée (environ 220 morts en Afrique, dont une grande partie d’expatriés, contre 50.000 en Europe lundi).

Des déclarations dignes de l’apartheid

Après les peoples, des intellectuels algériens ont lancé ce weekend une pétition pour « dénoncer le scandale de la proposition des deux professeurs français. « Les Africaines et les Africains ne sont pas des rats de labos », s’insurgent les auteurs de la pétition qui rappellent qu’il n’y a eu aucune excuse de la part des mis en cause. « Cette déclaration, d’une extrême gravité, traduit les valeurs inhumaines et racistes qui sous-tendent l’idéologie digne de l’apartheid de certains nostalgiques du colonialisme de certains pays dits développés», continuent-ils. Ces intellectuels trouvent encore plus inacceptable que le Pr Jean-Paul Mira ait affirmé, au lendemain de sa proposition sur LCI, qu’il avait d’ores et déjà obtenu l’accord de « plusieurs Etats africains, notamment ceux de l’Afrique de l’Ouest qui ont reçu chacun des enveloppes conséquentes pour les dommages ».

Les avocats africains passent à l’action

Pour aller plus loin, un collectif d’avocats issus de plusieurs pays d’Afrique (Gabon, Bénin, Congo, Sénégal, Mauritanie, Tunisie, Cameroun, Côte d’Ivoire et Algérie) a annoncé qu’il va saisir le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA) en France pour demander des excuses officielles de LCI. Dans un communiqué de presse daté du 3 avril 2020, Me Nabil Boudi, avocat au Barreau de Paris, indique que les propos tenus sur LCI par les Professeurs Jean-Paul Mira et Camille Camille Locht laissent « suggérer que les populations africaines sont un laboratoire de cobayes pour les pays européens ». Le collectif envisage d’aller en justice si nécessaire.

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